Mortier à décor de "Toucan de Cayenne, dit toco", Manufacture de Sèvres
Provient du service livré le 15 mars 1787 au comte de Montmorin, ministre des Affaires étrangères,
pour être offert à Eleanor Eden, épouse de William Eden,
ministre plénipotentiaire de Grande-Bretagne.
Inv. CAM 292.0544
© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance
Les services « aux oiseaux Buffon » du comte Moïse de Camondo.
Une encyclopédie sur porcelaine
Musée Nissim de Camondo
du 13 octobre 2016 au 15 janvier 2017 Le musée Nissim de Camondo possède une exceptionnelle collection de services de Sèvres à décor ornithologique, connus sous le nom de « services Buffon ».
Véritable encyclopédie en images peintes sur porcelaine, les services sont exposés pour la première fois au complet en regard des illustrations empruntées aux archives Buffon et aux volumes de l’édition de luxe de l’Histoire naturelle des oiseaux (Paris, Bibliothèque centrale du Museum national d’Histoire naturelle) ainsi que de gravures de François-Nicolas Martinet.Cette collection comprend environ 350 pièces, acquises par le comte Moïse de Camondo, allant du service de table, aux compotiers, en passant par les seaux à glace, mortier, jatte à punch ou encore tasses à glace.
Cette exposition sera l’occasion de dresser la table de la salle à manger du musée pour dix couverts à l’aide du service Lefebvre orné d’oiseaux polychromes et camées en grisaille. (Pour mémoire !)
« Toucan de Cayenne appelé Toco »,
gravure de François-Nicolas Martinet
illustrant l’Histoire naturelle des oiseaux de Georges-Louis Buffon, 1771-1786
© Photo Muséum national d’Histoire naturelle, Dist. RMN-Grand Palais / image du MNHN, bibliothèque centrale
Acquis en plusieurs lots à partir de 1898, cet ensemble est l’un des chefs d’œuvre du musée Nissim de Camondo. Le comte Moïse de Camondo se singularise en effet par son intérêt pour les porcelaines européennes de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Il apprécie particulièrement les pièces à décor d’oiseaux dans des paysages, produites par les manufactures de Meissen et Sèvres. Mais c’est la réunion de services de table en porcelaine de Sèvres, production luxueuse par excellence, qui va retenir toute l’attention du collectionneur.
Exposé dans le cabinet des porcelaines spécialement aménagé à cet effet, ce service témoigne à la fois de son goût pour l’une des productions les plus brillantes de la manufacture royale de Sèvres et de son intérêt pour l’ornithologie naissante sous le règne de Louis XVI.
Le XVIIIe siècle est celui de la naissance des sciences naturelles comme discipline scientifique et plus particulièrement de l’ornithologie. Rassemblées dans les cabinets de curiosités qui se multiplient, les collections d’histoire naturelle deviennent des objets d’étude, telles celles de Réaumur et du Cabinet du Roi. Parallèlement, la parution de nombreux ouvrages popularise ces matières nouvelles auprès d’un large public.
Compotier « coquille »,
Manufacture royale de Sèvres, porcelaine tendre, peinte et dorée, 1784
Henry-François Vincent, dit Vincent le jeune, et plus tard, Vincent père (doreur)
Oiseaux nommés au revers :
au centre, Spatule Couleur de rose, de Cayenne ;
en haut, Péruche a gorge tachetée, de Cayenne ;
en bas, Bouvreuil femelle ;
à droite, Gros bec, de l’Isle de Bourbon ;
à gauche, Perdrix rouge mâle de France
© Photo Les Arts Décoratifs, Paris / Jean Tholance
L’Histoire naturelle, générale et particulière, avec la description du Cabinet du Roy est l’œuvre majeure de Georges-Louis Leclerc, futur comte de Buffon, et l’occupera toute sa vie. Dès sa jeunesse, il se distingue par ses brillants travaux de mathématicien qui lui ouvrent les portes de l’Académie des Sciences. C’est le point de départ de l’Histoire naturelle, ouvrage encyclopédique paru en 36 volumes de 1749 à 1789, et dans lequel Buffon entreprend non seulement de décrire et classer les collections royales, mais aussi d’expliquer l’ensemble du monde naturel, des minéraux jusqu’à l’être humain.
Comme Réaumur avant lui, Buffon s’appuie sur un réseau de correspondants qui lui envoient du monde entier des spécimens vivants, des notes, des descriptions parfois accompagnées de dessins… Son Histoire naturelle est souvent comparée à l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, sur le principe de la diffusion du savoir lié à l’époque des Lumières, mais surtout en termes de notoriété et de nombre d’exemplaires imprimés.
Buffon attachait beaucoup d’importance aux illustrations, qui furent assurées par
François-Nicolas Martinet pour les oiseaux, dans une édition in-folio en 10 volumes, publiée de 1771 à 1786. Au total, ce sont 1008 planches en couleurs, dessinées et gravées, et représentant 1239 espèces ornithologiques, qui seront éditées.
Ingénieur de formation, François-Nicolas Martinet est nommé en 1756 graveur au Cabinet du Roi. Spécialiste des illustrations ornithologiques, ses gravures coloriées pour l’Histoire naturelle des oiseaux sont restées célèbres par leur qualité jusque-là inégalée. Buffon lui-même considère que « la collection de nos planches coloriées l’emportera sur toutes les autres par le nombre des espèces, par la fidélité des dessins, qui tous ont été faits d’après nature, par la vérité du coloris, par la précision des attitudes ; on verra que nous n’avons rien négligé pour que chaque portrait donnât l’idée nette et distincte de son original ».
Saucière à décor de « Pic tacheté de Nubie et ortolan du Cap de Bonne Espérance », porcelaine dure, 1792
Edme François Bouillat (peintre)
© Photo Les Arts Décoratifs, Paris / Jean Tholance
Utilisées par les peintres de la manufacture royale pour orner les services Buffon, les gravures en couleurs de Martinet pour l’Histoire naturelle des oiseaux vont donner sa véritable dimension au thème ornithologique à Sèvres. Le succès des décors aux « oiseaux Buffon » donne naissance à la création de 15 luxueux services de table, appelés communément « services Buffon », entre 1782 et 1796. Outre leur sujet ornithologique, ceux-ci sont reconnaissables aux noms des oiseaux inscrits au revers des pièces. On rapporte que Buffon appelait cette production d’exception, véritable encyclopédie en images qui allie merveilleusement raffinement de la décoration et vulgarisation scientifique : « Mon édition sur porcelaine ».
Tasse à glace à décor de « Tangara de Cayenne »,
porcelaine tendre, 1792
Massy (peintre) et Henri-Martin Prévost (doreur)
© Photo Les Arts Décoratifs, Paris / Jean Tholance
Posséder un service Buffon est particulièrement prestigieux car c’est à la fois être à la pointe du goût dans le domaine des arts de la table et donner à voir les découvertes de l’ornithologie naissante. La plupart des spécimens exotiques sont en effet inconnus en Europe, or l’ intérêt porté aux couleurs explique que beaucoup d’oiseaux reproduits sur les services Buffon appartiennent à des espèces exotiques, notamment tropicales.
Cette production luxueuse ne pouvait que séduire le comte Moïse de Camondo, fervent admirateur de la France des Lumières. L’exposition sera l’occasion d’étudier de manière approfondie les services Buffon du musée Nissim de Camondo sous l’angle de leur acquisition par le comte de Camondo.
Le public pourra ainsi admirer une centaine des plus belles pièces des services Lefebvre (1784), Kendal (1785), Eden (1787) et Madame Lefebvre (1792) achetés par le collectionneur entre 1898 et 1920. Les pièces de forme seront données à voir dans toute leur variété (compotiers, seaux à glace, mortier, jatte à punch, tasses à glace…) et les meilleurs peintres d’oiseaux particulièrement mis à l’honneur. Enfin seront classés par espèces et provenances géographiques, révélant l’importance des anciennes possessions françaises dans l’étude monumentale menée par Buffon et son apport quant à la découverte d’oiseaux jusqu’alors inconnus comme ceux de Cayenne, en Guyane.
Commissariat. Sylvie LEGRAND-ROSSI, Conservatrice en chef au musée Nissim de Camondo
ConférenceEntre art et science, les services aux « oiseaux Buffon » du comte Moïse de Camondo : acquisition, composition et décors ornithologiques
Le musée Nissim de Camondo abrite une exceptionnelle collection de services de Sèvres à décor ornithologique, inspirés par les planches aquarellées de François-Nicolas Martinet pour l’édition de luxe de l’ »Histoire naturelle des oiseaux » du comte de Buffon, parue en 10 volumes entre 1771 et 1786. Ces « services Buffon » comprennent environ 350 pièces acquises par le comte Moïse de Camondo en plusieurs lots à partir de 1898.
Cette conférence permettra de découvrir comment il les a achetés, de présenter la méthode suivie pour recomposer, pièce à pièce, les quatre parties de services aujourd’hui conservées au musée, et, enfin, de comparer les oiseaux reproduits par les peintres sévriens avec les planches enluminées de Martinet qui les ont inspirés.
Une mise en perspective des services du musée Nissim de Camondo avec les quinze services Buffon produits par la Manufacture entre 1782 et 1796 conclura cette présentation.
Mercredi 23 novembre 2016 de 18:30 à 20:00 RéserverMusée Nissim de Camondo
63, rue de Monceau
75008 Paris
Tél. : 01 53 89 06 50 ou 06 40 (boîte vocale)http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/musees/musee-nissim-de-camondo/Cette exposition a bénéficié du soutien de la galerie Steinitz et de donateurs qui ont souhaité rester anonymes.