Cela s'est passé en 1684 selon Dangeau

"Monseigneur le duc de Bourgogne eut la fièvre tout le jour, mais sur le soir elle diminua considérablement. - Monseigneur le Dauphin prit médecine, et se fit apporter une caisse que M. de Barillon lui envoyoit; il se promena le soir, au frais, sur la terrasse devant son appartement – Il régla avec M. de Louvois tout ce qu'il falloit pour transporter en bas son cabinet de marqueterie et de glaces qu'il avoit en haut (1).

Le roi se promena avec madame la Dauphine. On chanta le Te Deum à Paris pour la prise de Luxembourg."

Dangeau évoque, ce jour, le déménagement des décors de marqueterie du cabinet des glaces de l'entresol de l'appartement de Monseigneur au premier étage de l'aile des princes "dans la grande aisle" pour les rétablir dans le nouvel appartement de Monseigneur  du rez de chaussée sous le grand appartement de la reine

(1) L'appartement du Dauphin, à Versailles, était au rez-de-chaussée, au-dessous de celui de la reine, dans la partie occupée sous Louis Philippe aujourd'hui par les portraits des amiraux, des connétables et des plus anciens maréchaux de France et aujourd'hui l'appartement de la dauphine Marie Joséphe.
Le cabinet de marqueterie donnait sur une galerie basse qu'on nomme sous Louis Philippe la galerie Louis XIII.

« Ce cabinet, dit Félibien, a de tous côtés et dans le plafond des glaces de miroirs avec des compartiments de bordures dorées sur un fond de marqueterie d'ébène. Le parquet est aussi fait de bois de rapports et embelli de divers ornements, entre autres des chiffres de Monseigneur et de madame la Dauphine. »
Piganiol ajoute : « C'est le chefs-d'œuvre de Boule et celui de son art. »


En savoir plus
les appartements du grand dauphin, fils de Louis XIV à Versailles
Topographie des appartements du premier étage de l'aile des Princes

Le matin, Monseigneur le duc de Bourgogne n'eut point de fièvre, mais elle lui reprit le soir avec un petit redoublement.
Madame la Dauphine se trouva assez incommodée d'un mal de dents. ·
Madame de Ventadour prêta le serment de dame d'honneur de Madame entre ses mains, et Monsieur l'embrassa ensuite, se réjouissant de voir cette affaire terminée.
Le roi donna un grand souper aux dames à Trianon.
On apprit la mort de M. de Montplaisir, lieutenant de roi d'Arras, homme fort connu par plusieurs bons endroits.

personnages cités :

M. de Montplaisir :
René de Bruc, marquis de Montplaisir (1610-1682), Auteur de poésies, lieutenant général à Arras en 1640, maréchal de camp en 1651.
Achète la terre de la Guerche en 1677 à Marie-Madeleine de Castille, veuve de Fouquet, érigée en marquisat par lettres de février 1682.

C'est une promenade nautique que décrit Dangeau pour cette journée.
"Le roi se promena sur le canal avec les dames ; il y eut musique dans les bateaux qui suivoient celui du roi."
On conta, au petit coucher, la banqueroute de d'Alençay, qui surprit tout le monde, et l'on dit que le prieur de Cabrières étoit à l'extrémité. M. le duc de Bourgogne eut la fièvre tout le jour.
On sut la mort de M. d'Orsay, frère de madame de Montchevreuil, qui avoit été tué malheureusement à la chasse par un soldat..

En savoir plus, un air de Venise à Versailles

Le roi se promena à pied, madame la Dauphine se promena en carrosse; Monseigneur courut le cerf.
On eut nouvelles que M. l'électeur de Trèves consentait que les dehors de Trèves fussent rasés et les fossés comblés et que M. le maréchal de Créqui y faisoit travailler.
Le roi voulut que madame d'Arpajon commençat à faire ses fonctions dans sa charge, quoiqu'elle n'en eût pas encore prêté le serment.
La fièvre quitta hier Monseigneur le duc de Bourgogne.


Un jour "ordinaire" comme tant d'autres, comme on le verra au fil des jours.
Il est question de promenades aujourd'hui. Chacun , selon ses préférences.
A part cela, il y a les potins du jour, que la Cour " se refile" dans les galeries et les antichambres , dés que l'information est déclarée : actualités militaires du jour, le prise de fonction de la duchesse d'Arpajon comme dame d'honneur de la dauphine de Bavière et le bulletin de santé du Duc de Bourgogne que l'on sait fiévreux depuis plusieurs jours.

personnages cités ;

Madame la Dauphine régla elle-même les comédiens; on en chassa quatre, la Debrie, la Donnebaut, la Dupin et un homme; la Torillière fut reçu.
Madame la Dauphine régla aussi les rôles de tous les comédiens.
Le roi se promena en carrosse avec madame la Dauphine;
S. M. vouloit donner un grand souper dans l'appartement bas, mais le froid l'en a empêché.

En tant qu'ordinatrice des fêtes de Versailles, c'est la dauphine de Bavière, avec l'aval du roi, qui décidait des programmations des comédies, mettant à l'occasion au chômage, certaines comédiennes qui ne plaisaient pas comme ce jour ci

Quant à l'appartement bas cité par Dangeau, s'agit-il de l'appartement des Bains de Louis XIV au rez de chaussée du château ?


Nous savons que, primitivement, l'appartement des Bains, appelé parfois "l'appartement bas" était précédé, en 1684, de quatre vestibules, servant de salles de pas perdus : la salle des Hoquetons, le vestibule de la Paix, le vestibule de la Guerre et le vestibule dorique.(Versalia 17-2014 - p.109)

En 1684, ces vestibules pouvaient être le cadre de grands soupers et de festins, offerts par le roi aux dames de sa cour, lors de certaines fêtes.
Ces vestibules, sauf le dernier, disparaitront à la fin du règne de Louis XIV et au début du XVIIIe, quant on les cloisonna pour y établir l'appartement du marquis d'O, gouverneur du comte de Toulouse, qui habita l'appartement des Bains, après la disgrâce de la marquise de Montespan.

Effectivement cher Surintendant,
à cette date "appartement bas" et "appartement des bains" désignent les mêmes espaces.

Le roi donna à souper aux dames dans l'appartement bas, avec la musique.
Monseigneur commença à se baigner dans la rivière.
Du Charmel eut l'agrément du roi pour la seconde fois pour la charge des Becs de Corbin.
Il y avoit eu quelque difficulté pendant la vie du maréchal d'Humières, qui avoit la survivance; cela avoit retardé l'affaire.
Le roi ordonna une colonnade de marbre (1) avec de grosses fontaines dans l'endroit où étoient les sources.

Le grand souper dans "l'appartement bas" du roi a bien lieu, dans ce que l'on croit être les vestibules précédents l'appartement des bains de Louis XIV au rez de chaussée nord du château.

Il est question de baignades à la " Rivière". De quelle rivière s'agit il ? dans les environs de Versailles, on ne peut compter que sur La Seine.

A cette époque, les princes, et tout particulièrement la nouvelle génération, comme le Grand dauphin, découvraient les joies  des bains de rivière, à ne pas confondre avec les " bains de santé" : bains thérapeutiques prescrits par les médecins suite à certaines maladies et sous Louis XIV les très rares bains de propreté faits dans les appartements , les chambres et la piscine de l'appartement des Bains.On ne saurait dire si des dames avant gardiste participaient également aux joies des bains de rivières, bien avant les véritables bains de mer de la duchesse de Berry en Normandie ou de l'impératrice Eugénie à Biarritz.La fameuse scène du bain de rivière dans le film Angélique et le Roy, qui peut illustrer ce sport nautique, est t elle une pure fiction ?


Vue la frêle constitution de la dauphine de Bavière, perpétuellement malade, il est tout à fait certain qu'elle n'osera jamais mettre un pied dans l'eau d'une rivière ! Dangeau n'en ferra jamais illusion en tous cas.

Il est question, pour la première fois, du projet de construction de l'actuel Bosquet de la Colonnade, que l'on construira à la place d'un ancien bosquet rustique, traité à l'anglaise, avec allées sinueuses pleines de petites sources.
Ce petit bosquet, ombragé et frais, avait tant plu au roi, que Louis XIV en fit faire un second, dans les jardins du grand Trianon, cette fois ci, à l'emplacement de l'actuel Jardin du Roi.

message connexes ;
Le premier bosquet des Sources
La colonnade


Le bosquet de la colonnade élevée sur les dessins de J. H. Mansart existe encore dans le parc de Versailles.

personnages cité :

Du Charmel :
Louis de Ligny (1645-1714) comte du Charmel, capitaine des becs-à-corbin et lieutenant général de l’Ile-de-France.

Le roi se promena à pied dans ses jardins et en calèche dans son parc avec Monsieur ; il alla à deux de ses faisanderies voir 4,000 faisandeaux et 4,000 perdreaux qu'il fait élever et qu'il fera lacher dans son parc.
Le roi nous dit que M. de la Mothe, lieutenant général des armées du roi et colonel du régiment d’Enghien, étoit mort d'apoplexie en Catalogne. C'étoit un homme de beaucoup de mérite, et qui avoit toujours été attaché à M. le Prince.
Il nous dit aussi qu'un capitaine de cavalerie dans le régiment de Bligni, nommé Languets, qui avoit été nourri son page, avoit été tué en duel à Schélestadt, où il étoit en garnison, et que Effiat, qui l'a tué, avoit été arrêté et qu'on travailloit à son procès.
Il dit aussi que la ville de.... s'étoit jointe aux seize autres et qu'il n'y avoit dans les États d'Hollande que Rotterdam et la voix des nobles qui s'opposassent à accepter les conditions du roi; que les États d'Hollande avoient été en corps porter leur résolution aux états généraux, où les provinces d'Utrecht, de Frise et de Groningue étoient de même avis; les quatre autres demandèrent quelques jours pour délibérer, mais tout va à la paix.
M. le maréchal de Schomberg a 120 escadrons dans son armée et 50 bataillons.


Visite d'inspection du roi et de son frère aux faisanderies de Versailles.
Une faisanderie est un terrain ou un domaine où sont élevés des faisans pour la chasse à tir. Par extension, il peut s'agir d'une volière ou d'un pavillon près d'un château où sont engraissés des faisans d'élevage pour la table. Il exista plusieurs faisanderies dans le parc de Versailles, qu'il faudrait localiser suivant les époques


Ce terme apparaît au xvie siècle avec le développement de ce sport dans l'aristocratie européenne. Nombre de châtelains au xviiie siècle se font construire une faisanderie dans leur domaine, ou nomment ainsi leur pavillon de plaisance servant de rendez-vous de chasse, près du château principal.
Dangeau poursuis, comme à son habitude , avec l’actualité du jour relative aux nouvelles du front.


Personnages cités :

M. de La Mothe :
Charles Guillaud de La Motte (1624-1684), seigneur de La Motte, Bideux, Montberon, baron de Boucé, lieutenant général des armées du Roi, capitaine et gouverneur du château de Moulins, mestre de camp du régiment d'Enghien. le prince de Condé, son protecteur, sollicita et obtint pour lui des lettres de noblesse en septembre 1677.

M. le maréchal de Schomberg
Frédéric-Armand, duc de Schomberg (1615-1690), maréchal de France en 1675

On apprit la mort de M. Charton, président de la première des requêtes du palais; son fils est venu demander la charge au roi.
Pendant que nous étions à Trianon à jouer à la paume par le bois, le roi vint s'y promener.
M. le Prince vint de Chantilly à Versailles.
Le roi fit partir M. de Batimont, lieutenant des gardes du corps, avec dix gardes pour arrêter quelqu'un.


On joue à la paume - ancêtre du tennis - à Trianon
Monsieur le Prince, c'est à dire le fils du Grand Condé, vient en visite à Versailles.
Ce prince disposait d'un appartement au rez de chaussée de l'aile des Princes - dans le premier appartement double.



En savoir plus sur le jeu de paume
Jeu de paume : roi des sports et sport des rois

Monseigneur continua à se baigner dans la rivière.
Le roi se promena le soir avec madame la Dauphine, et, au retour, il у eut musique sur le grand degré (1).
Le roi se fâcha assez sérieusement contre M. de la R. pour quelques changements qu'il avoit faits à des logements.
On sut que M. de Batimont avoit arrêté M. de Meckelbourg et l'avoit mené à Vincennes. Il avoit promis au roi, par un traité qu'il avoit signé de sa main, de livrer aux troupes de Danemark la place de Deintz, et n'a pas tenu parole; c'est M. de Gourville qui avoit fait la négociation avec M. de Meckelbourg.


Les baignades " en rivière" continue pour le Grand Dauphin.
Un concert est donné dans le grand escalier des Ambassadeurs.

Le Roi prenait en charge généralement tous les travaux et rafraichissements de peintures effectués dans tous les logements du château sans distinction aucune suivant leurs occupants.
Un duc voulait une cloison et l'ouverture de portes, sa femme la duchesse une belle cheminée dans son cabinet, un gentilhomme l'extension de son logement avec des entresols, une princesse des "compléments de sculptures et de dorures" pour ses boiseries, une femme de chambre des placards et rangements utiles à sa fonction, une dame frileuse des doubles châssis aux fenêtres l'hiver venu, la dame d'atours des armoires avec des tiroirs à coulisses et porte manteaux , les plus favorises demandaient et obtenaient , de la bienveillance du roi, des logements de plus de 10 pièces ! ...

Certains courtisans ou commensaux, ainsi sans vergogne, refaisaient régulièrement leurs logements fréquemment, au frais de la couronne. Louis XIV fut contraint de sévir avec certains ...
M de La R. est il le duc de La Rochefoucauld ?
Un duc de cette célèbre famille ducal française avait en effet modifié plusieurs fois la distribution de son logement au bout de l'aile vieille, après la mort du duc d'Antin selon le Duc de Luynes.


(1) Le " Grand degré etait le Grand escalier d'apparat du Roi ou des Ambassadeurs, détruit en 1752.
On lit dans le Mercure de juin 1682 :
« Il y a quelquefois symphonie, et l'endroit où elle se fait entendre le plus agréablement est le grand escalier du roi. Lorsqu'il est plein de lumière, il peut disputer de magnificence avec les plus riches appartements des plus beaux palais du monde. »

petits compléments :

Citation :

On apprit la mort de M. Charton, président de la première des requêtes du palais ; son fils est venu demander la charge au roi.

Il s'agit de Louis Charton ou Charreton (16..?-1684), seigneur de La Douze, châtelain de Marolles.
Reçu conseiller au parlement de Paris à la 3e chambre des enquêtes le 27 janvier 1626, président en la première chambre des enquêtes à partir d'avril 1641.

Citation :

Le roi fit partir M. de Batimont, lieutenant des gardes du corps, avec dix gardes pour arrêter quelqu'un.

Il s'agit de Louis-Joseph de Rochechouart , baron du Bâtiment ou de Batimont,
lieutenant de la première compagnie des gardes du corps du roy mort en 1696.

Citation :

On sut que M. de Batimont avoit arrêté M. de Meckelbourg et l'avoit mené à Vincennes.

Il s'agit de Christian-Louis de Mecklembourg-Schwerin (1623-1692), duc de Mecklembourg-Schwerin de 1658 à 1692.
Installé en France et marié en 1664 à Élisabeth-Angélique de Montmorency-Bouteville (1627-1695), duchesse de Châtillon.

Citation :

c'est M. de Gourville qui avoit fait la négociation avec M. de Meckelbourg.

Il s'agit de Jean Hérault (1625-1703), baron de Gourville, mémorialiste français, maître d’hôtel puis secrétaire de La Rochefoucauld, prince de Marcillac puis intendant de la maison de Condé.

Monseigneur alla à Paris à l'Opéra,qu'il entendit dans la loge de Monsieur, et revint avec lui à Versailles.
Nous apprîmes que le roi avoit donné à M. le marquis d'Estrades, pour l'abbé son fils, l'abbaye de Saint-Melaine de Rennes, vacante par la mort de l'ancien évêque de Condom, frère du maréchal.


Rien d'exceptionnel aujourd'hui, le Grand Dauphin va assister à un opéra à Paris.
Issu du ballet de cour et de l’opéra italien, l’opéra français vit le jour au début du règne de Louis XIV, avec la création, en 1669, de la première « Académie d’opéra ».
Etant une personne de première ordre et mécène, le Grand Dauphin se devait d'assister aux "premières". Il y va seul, la Dauphine était probablement indisposée...
Pendant ce temps, Le roi " donne" des abbayes.

Citation :

Nous apprîmes que le roi avoit donné à M. le marquis d'Estrades, pour l'abbé son fils, l'abbaye de Saint-Melaine de Rennes, vacante par la mort de l'ancien évêque de Condom, frère du maréchal.

Il s'agit ici de Godefroi, Comte d'Estrades, (1607-1686), diplomate, maréchal de France, maire de Bordeaux, vice-roi de la Nouvelle-France.
et de son fils Jean-François d'Estrades (1647-1715), abbé commendataire de Moissac et de Saint-Melaine de Rennes, ambassadeur de France en Italie,
et enfin de son frère cadet, Jean d'Estrades (vers 1608-1684), évêque de Périgueux puis de Condom, mort le 12 juin 1684.

Le roi déclara qu'après le deuil on pourroit porter de l'or et de l'argent; ainsi les marchands vont faire travailler à des étoffes. - Le bain de Monseigneur continua.
Le roi se promena sur le canal avec les dames; il y eut de la musique; les courtisans suivoient dans des bateaux.
Ce jour-là et les deux précédents, on ne parla que des dispositions qu'il y avoit à la trêve avec les Hollandois, et l'on attendoit à tout moment des nouvelles de la conclusion. - On attendoit aussi des nouvelles de M. le maréchal de Bellefonds, qui avoit ordre d'assiéger Capdequiers.

Aujourd'hui, Louis XIV déclare la fin du port d'un deuil, qui règlementé la qualité et la matière des étoffes des habits. Nous ignorons la tète couronnée dont on portait le deuil  durant cette période.Dangeau ne nous informe pas.
Le Grand dauphin continue ses baignades en rivière
Le Roi proposait à sa Cour, une vie rythmée par des divertissements permanents. Aux beaux jours, on navigue en gondole ou en chaloupe sur le Grand canal avec, souvent, des musiciens embarqués. Comme à l'accoutumée, on disait " à l'ordinaire" : la promenade du jour de l'après midi se fait sur le Grand canal avec des embarcations et la Musique qui suit
En parallèle de ces divertissements de plein air, on suit toujours les actualités du front.


Liens connexes :
L 'étiquette : le deuil à la Cour
Les transports : la flottille du Grand canal
Personnage cité : le maréchal de Bellefonds.

Monseigneur continua à se baigner; le roi alla tirer; madame la Dauphine et Monseigneur se promenèrent ensemble pendant que le roi étoit à Trianon.
M. de la Rongère Quatrebarbes eut ce jour-là l'agrément de la charge de chevalier d'honneur de Madame.
- M. le maréchal d'Humières envoya à du Charmel la démission de la charge de capitaine des Becs de Corbin qu'il lui vendoit 20,000 écus.

Le Grand dauphin est très sportif : il continue toujours ses baignades
La promenade de l'après midi  se déroule à Trianon, avec Madame la Dauphine et Monsieur, sans le roi.
S'il s'agit de la promenade, elle se fera dans les jardins soit à pied, soit en calèche avec les dames.
Apparemment , Sa Majesté chasse aujourd'hui avec un " tiré" proprement dit dans les bois environnant Trianon peut être.Dangeau ne précise pas le lieu de la chasse royale.
Louis XIV est le premier souverain à pratiquer assidûment la chasse à tir. Il fait établir une douzaine de parquets entourés de palissades où il chasse seul pendant plusieurs heures les animaux élevés sur place ou lâchés et rabattus vers lui. En 1689 il chassera 137 fois à tir.
Le Roi chasse" à tir" particulièrement à Fontainebleau entre septembre et novembre.


Le Roi nomme comme Chevalier d"Honneur de Madame, un Monsieur de Quatrebarbes. Avec un nom pareil, on a du rire sur le compte du pauvre Chevalier

La charge de capitaine des Becs de Corbin est vendue.
Les gentilshommes à bec de corbin formaient deux compagnies de la maison militaire du roi .Ils tiraient leur nom de leur hallebarde (lance) en forme de bec de corbin.
La première compagnie forte de cent gentilshommes fut instituée par Louis XI en 1478. Charles VIII établit la seconde en 1497. Supprimées sous Louis XIII ces deux compagnies furent rétablies sous Louis XIV et enfin licenciées définitivement en 1776 sous le ministère du comte de Saint Germain.
Les gentilshommes à bec de corbin précédaient le roi dans les grandes cérémonies en marchant deux à deux.


Liens connexes
Charge ciblé : Chevalier d'honneur
Le chevalier d'honneur de la reine

a propos des personnes cités :
- Louis IV de Crevant (1628-1694), Duc d’Humières, Maréchal de France

- Hyacinthe Quatrebarbes , marquis de la Rongere , seigneur de Saint-Denis au Maine , chevalier d'honneur de Madame , duchesse d’Orléans,
né le 1er janvier 1644, mort à Paris, au Palais-Royal, le 22. décembre 1703.
Il fut chevalier de l'ordre du Saint-Esprit en 1688, et créé marquis de La Rongère par lettres patentes du 31 décembre 1684.

Saint-Simon dira de lui : "c'était un gentilhomme du pays du Maine, qui avec un nom ridicule, était de fort bonne noblesse.  Il s'appelait Quetre-Barbes.
C'était un fort honnète homme, très-court d'esprit, mais de taille et de visage à se louer sur le théatre pour faire le personnes des héros et des dieux."
et plus loin : "C'était un des plus beaux et des plus honnestes hommes de la cour du grand roi où il passa sa vie, chevalier des Ordres du Saint-Esprit et de Saint-Michel.
Il ne laissa que deux filles de son premier mariage."

Monseigneur continua de se baigner. Le roi se  promena sur le canal avec madame la Dauphine et les dames; ils soupèrent dans le bateau où il y avoit eu musique.
On sut que les Hollandois étoient prêts à signer la trêve; et le premier courrier doit apporter la nouvelle de la conclusion.

A l'ordinaire, Monseigneur continue ses baignades et le roi, ses promenades nautiques avec sa belle fille.
Un souper a lieu à bord de l'embarcation.

Il y eut une fête à Trianon, où l'on servit quatre tables; on s'y promena et on y dansa longtemps.
Le roi dit à la comtesse de Grammont qu'il avoit choisi mademoiselle d’Hamilton, sa nièce, pour sixième fille de madame la Dauphine.
On apprit la mort de M. de Pompadour, chevalier de l'Ordre, et lieutenant de roi de Limousin. Il déshérite en mourant madame de Saint-Luc, sa fille; ainsi tout son bien tomboit à mademoiselle de Pompadour.

Aujourd'hui, il y a fêtes et soupers à Trianon.
Louis XIV nomma Mlle d'Hamilton comme fille d'honneur de la Dauphine de Bavière nièce de la comtesse de Gramont


Personnages cités :
- la comtesse de Gramont, née Hamilton

Sujets connexes
- Diners et soupers au Grand Trianon sous Louis XIV
- Les filles d'honneur de la Dauphine de Bavière

autres personnages cités :

Mademoiselle Hamilton, nièce de la comtesse de Gramont :
Il s'agit très probablement de Elizabeth Hamilton (1667–1724),
fille de Sir George Hamilton, comte d'Hamilton (mort 1676), frère de Mme de Gramont
mariée en 1685 à Richard Parsons, Vicomte Rosse.

M. de Pompadour :
Jean Hélie, marquis de Pompadour, baron de Treignac (mort en 1684),
lieutenant général des armées du roi en limousin, chevalier des ordres en 1661.

madame de Saint-Luc :
sa fille, Marie Hélie de Pompadour (morte en 1723),
mariée en 1674 avec François d'Espinay, marquis de Saint-Luc.

Mademoiselle de Pompadour :
sa fille puinée, Marie Françoise Hélie de Pompadour (morte en 1726),
mariée en 1687 avec François Marie de Hautefort, marquis de Hautefort

Un courrier apporta la nouvelle de M. d'Avaux que toutes les provinces de Hollande acceptoient les propositions du roi pour la trêve, et qu'on travailloit au traité qui seroit signé par tous les députés des provinces.
Monseigneur continua de se baigner.

Il est toujours question de baignades et des nouvelles du front.

personnage cité :

M. d'Avaux :
Il s'agit de Jean Antoine de Mesmes, comte d'Avaux (1640-1709), ambassadeur en Hollande de 1678 à 1689.

Rare représentation de baignade, au XVIIe siècle :

Le roi se promena sur le canal avec madame la Dauphine; il y eut musique.
Monseigneur continua de se baigner.
M. de la Rongère prit possession de la charge de Chevalier d'honneur de Madame, qu'il acheta du marquis d’Estampes 98,000 francs.
Pendant ces trois derniers jours j'étois à la campagne à Chantilly et à Liancourt.


La promenade du roi se fait sur le Grand canal avec la musique " à l'ordinaire".


Le Chevalier d'honneur prend possession de sa charge auprès de la belle sœur du roi, la duchesse d'Orléans.
Il va prêter serment, pour cette charge, entre les mains de la princesse.
Dangeau a quitté la Cour 3 jours mais est toujours informé de ce qui se passe.

personnage cité :
Charles d'Estampes (mort en 1716), dit le "Marquis d'Estampes", marquis de Mauny et de la Ferté-Imbault.
D'abord maître de camp d'un régiment de cavalerie, il devient chevalier d'Honneur de Madame, en 1681,
capitaine des gardes de Philippe d'Orléans, chevalier des Ordres du roi, en 1688.
Il épouse, en 1674, Marie du Régnier, fille et héritière de Louis du Régnier, seigneur de Droué et de Montigny.

Monseigneur devoit aller à Paris voir la comédie italienne, mais il remit la partie au lendemain,
parce qu'il vouloit être ici de bonne heure, le roi devant souper chez lui avec toutes les dames.
On se promena longtemps sur le canal avec de la musique.
Monseigneur donna son souper dans l'appartement bas.
Il y avoit trente personnes au souper, le roi, Monseigneur, Monsieur et vingt-sept dames.
Après souper, le roi se promena dans les jardins au clair de la lune jusqu'après minuit.

Le Grand Dauphin devait se rendre à la Comédie Italienne à Paris (Théâtre installé à l'Hôtel de Bourgogne) mais finalement il décommanda car il invita Sa Majesté et les dames à un médianoche en soirée : il ne voulait pas manquer cette réception de nuit.


Ce grand souper - peut être ce qu'on appelait à la Cour un médianoche - Collation ou repas plutôt léger, pris au milieu de la nuit, généralement peu avant ou après minuit afin d'assurer la liaison entre la fin d'un jour maigre et le début d'un jour gras. - eut lieu dans l'appartement bas du roi - dont on a déjà parlé - vraisemblablement dans les vestibules précédent l'appartement des Bains. Dangeau va jusqu'à compter 27 dames, mais malheureusement il n'indique pas le menu du souper et du buffet. Le repas se clôtura par une  promenade aux flambeaux au clair de lune dans les jardins jusqu'à tard dans la nuit.